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Créer des PNJ

Lundi 21 Avril 2014

  On passe souvent à côté de grandes figures d'un scénario ou d'une campagne. Une partie peut très bien se passer, mais ne sera aucunement retenue par les joueurs parce que son déroulement n'aura été que linéaire, sans surprises et sans moments forts où les joueurs se sentent complètement immergés dans l'univers. Un moyen pour les accrocher et les faire réagir : les PNJ.

 

  Bien sûr, chaque jeu de rôles a ses PNJ. Ils sont essentiels au meublage des décors, des quêtes, missions et périgrinations. Mais je ne parle pas ici des figurants de l'histoire. Je parle plutôt des personnages qui sont autant travaillés que les personnages de vos joueurs. Ils ont une histoire, une personnalité, des traits de caractère, des centres d'intérêt et une vision personnelle de vos joueurs. Ils demandent une vraie construction, sérieuse et correspondant à l'histoire. Il faut aussi qu'ils aient une utilité, sinon ils sont uniquement là pour satisfaire les envies du MJ de placer des personnages qui ne brillent que dans leurs cieux, loin des joueurs.

 

  Le plus simple, à mon avis, et de définir vaguement des types de PNJ que vous placez à des points de passage spécifiques, stratégiques. Un informateur paranoïaque, un barman qui raconte des ragots intéressants contre des anecdotes, un policier verreux amateur de cigares, une guerrière intrépide qui peut lever une armée au nom des joueurs, etc.

Par la suite, pour leur donner vie, le MJ a un rôle à jouer, celui d'acteur. Le jeu de rôles est une petite pièce de théâtre, en comité réduit, et le MJ joue des dizaines de rôles – selon ses moyens et ses idées. Un bon PNJ est aussi un PNJ qui vit devant les joueurs, qui s'exprime différemment, qui existe tout à coup par la parole que le MJ lui donne. Il m'est arrivé de rencontrer des MJ qui ne jouaient pas leurs personnages, qui prenaient toujours les mêmes voix pour les hommes, les femmes...Je pense qu'en faisant cela, on omet qu'un personnage existe parce qu'on le fait parler, penser, et qu'on le joue d'une certaine façon. La création d'un personnage est véritablement liée à la façon dont on l'interprète.

 

  On peut aussi aller plus loin dans la création de ses PNJ. Au lieu d'avoir une histoire détachée du commun des mortels, ils peuvent tout simplement être l'histoire. Ils peuvent être les héros de vos campagnes, les salopards sans pitié qui harcèlent les joueurs, un ennemi juré, un rival sportif. Le plus intéressant dans ces cas précis, c'est que l'histoire se développera par vos intrigues, et par les relations que créeront vos personnages avec les joueurs. Les rapports "humains" donneront une note d'immersion supplémentaire, un point d'ancrage sérieux dans l'histoire. De plus, il peut se créer plus que des relations cordiales entre joueurs et PNJ. Dans l'actuelle campagne de Dreamland, mes joueurs sont par exemple en couple avec des PNJ présentés au fil des parties ; certains pensent au mariage, un autre a déjà des enfants...le tout restant ancré dans le jeu de rôles, ce qui donne un autre aspect aux parties.

 

 Pour finir, un dernier conseil. Si vous préférez diriger les parties sans scénarios, si vous êtes aventureux, vous pouvez également inventer des PNJ en improvisant. Un bon PNJ peut-être un personnage qui était prévu initialement sans éclat, ayant un but et un caractère précis, mais qui s'est transformé – pour ne pas dire transcendé – car le MJ l'a adapté à une situation, à la tension autour de la table, et l'a inscrit complètement dans l'histoire. Souvent, un très bon PNJ est improvisé, et ne demande aucune véritable création, si ce n'est l'idée hasardeuse qui mènera à des fous rires.

 

 

PS. J'utiliserai dans cette catégorie quelques uns de mes PNJ pour illustrer mes propos.

PNJ n°1: Crochemouille, le cauchemar de la traque

Lundi 21 Avril 2014

  Rien de tel qu'un PNJ essentiel à la partie et qui en profite (comprendre : le MJ tient ses joueurs entre sa main et en profite en jubilant). C'est encore plus savoureux quand le type est un déchet – littéralement – à la fois profiteur et téméraire.

 

  Crochemouille, c'est un personnage que j'ai sorti en improvisation durant une partie de traque de la campagne Dreamland, durant laquelle les joueurs ont du chercher une petite fille proche d'eux enlevée par une armée ennemie. Les joueurs ont remonté la piste sans savoir où se diriger. Coup de chance, dans un hotel de la ville de départ, des sbires appartenant au Royaume de la Misère traînaient encore pour vérifier le déroulement de l'enquête. Après avoir abattu trois des quatre sbires, le dernier se fait attraper. Je l'ai alors conçu dans la veine du vendeur de citrons de Kaamelott dans la saison 06, interprété par Manu Payet. Le dialogue fut à peu près le suivant : 

 

- Bon, mets-toi à table ou on te frappe !

- Les gars, vous avez mal compris, moi j'suis une balance ! Je vous raconte tout ce que vous voulez, pas besoin de frapper, j'vous assure...

*coup de poing sortant à toute vitesse*

- Alors, j'crois que vous n'avez pas compris...moi je parle sans qu'on doive me frapper. J'vous l'ai dit, je suis une petite salope. Faut juste me poser des questions !

 

  Assez drôle à jouer, au demeurant. Je ne comptais pas m'arrêter là, car le personnage était le seul capable de guider les joueurs. Crochemouille est un survivaliste qui n'a aucune morale. Il était effrayé, mais il se rendait bien compte qu'il pouvait tirer son épingle du jeu. En suivant les aventures des joueurs, il est retourné dans son Royaume natal, l'a vu se fait entièrement raser, et a commencé à faire payer ses informations, vu que les joueurs patinaient. Ainsi, pour chaque carrefour, intersection, ou simple doute sur le trajet, il s'arrêtait, faisait mine de réfléchir car il avait oublié le chemin. S'en suivait une nouvelle forme de dialogue :

 

- Qu'est-ce tu fous, Crachemouille ? (le surnom a été donné par les joueurs)

- Je ne me souviens plus de la route qu'on a empruntée...

- Ah, ça, ça ne va pas être possible !

- Je peux m'en souvenir...contre une rémunération généreuse, disons.

- Combien tu veux, enflure ?

- Pas énormément...10 mille ?

- QUOI ? Tu peux répéter ?

- 10 mille, sinon je crains que le chemin ne m'échappe à nouveau

- T'es...t'es un putain d'enfoiré...bon, qui lui file sa thune ?

 

  Cette scène s'est répétée un certain nombre de fois, et chaque fois qu'il demandait de l'argent, les joueurs hurlaient, soupiraient et esquissaient un sourire narquois en me regardant. Crochemouille s'est formé une petite fortune de cette manière, jusqu'à disparaître au moment où son utilité devenait véritablement discutable – des menaces de mort ayant déjà transpercé ses oreilles...

 

  Depuis, le simple sbire Crochemouille est devenu l'une des cibles à abattre si jamais il ré-apparaît dans l'histoire. Un joueur affirme depuis que c'est son ennemi juré dans tous les jdr. Son personnage aurait d'ailleurs pu tout faire pour le retrouver, s'il n'avait pas trouvé la mort dans un survival...j'ai fait apparaître de nouveau Crochemouille, sous couverture, bien planqué, car je ne peux pas laisser un PNJ aussi provocant dans la nature. Mais ce brave gars a changé, il a pris de l'envergure et de l'assurance...

 

 

La question qui se pose alors est : qu'est-il devenu ?

PNJ n°2 : Lionel, un cheval de Troie sous le capot

Lundi 21 Avril 2014

  Comment présenter le charme et l'élégance d'un personnage comme Lionel...réalisé à moité en amont de la partie, j'avais prévu de faire un type assez simplet, mais l'improvisation m'a mené vers des sommets. Je remercie par ailleurs mes joueurs, pour tous les PNJ qu'ils ont aidé à faire émerger, mais aussi pour la patience qu'ils mettent à l'épreuve face à de tels personnages. Ils savent que j'adore ces personnages un peu idiots, braves et complètement loufoques, et ils en redemandent, dieu soit loué !

 

  Lionel, c'est une brute au coeur fondant. Il dirige son écurie de course (type rallye) qui s'appelle sobrement Lionel Mach Force + (il y a encore un débat pour savoir si on dit plus ou croix, comme pour les feuilles Rizzla). Pilote de course suicidaire n'ayant aucune idée de ce que les mots danger et frein signifient, il vit sa vie à 100 à l'heure, s'arrêtant aux stands uniquement s'ils sont signés de la célèbre marque Kronenbourg. Il se nourrit de lasagnes à l'huile de moteur (que sa cuisinière réussit à la perfection !) et de bières jusqu'à finir totalement ivre mort, les fesses en l'air près de ses véhicules. Première particularité : Il mesure dans les 2 mètres 20, a les cheveux rouges comme une voiture qui flambe, le reste de sa peau blanche contrastant avec son style irlandais. Deuxième particularité : il est cyborg à 80% et souffre d'une amnésie complète et débilitante.

 

  Pour suivre ses aventures automobiles, l'écurie compte sur la seule personne douée de raison dans l'écurie, à savoir Hermann, un cyborg également, qui a rencontré Lionel quand il était mercenaire sur les champs de bataille. Il gère les comptes de l'écurie et crise environ 100 fois par jour. Aux cuisines, j'ai nommé la merveilleuse Moelleuse, qui sait cuisiner des plats gastronomiques à l'huile de moteur et qui se lave parfois les mains après avoir changé le moteur. Le dernier, et non des moindres, Franz dit "Nitro", le roi de l'explosion et des armes planquées dans la carosserie. Amateur vierge de superbes femmes (cf. le jeune qui a crée la femme en rouge, dans le premier Matrix), il compte sur Lionel pour lui apporter succès, gloire et carambolages explosifs.

 

  Mes joueurs, je ne vous le cache pas, ont mis du temps à apprécier Lionel. Au fur et à mesure des parties, il a manqué plusieurs fois de tuer le groupe. Il appelle ses co-pilotes Paquita (on en est au 28ème avec l'un des joueurs) et les autres Autoradio ou Allume-cigares. Mais, il s'est avéré que Lionel n'était pas Lionel...non, Lionel, c'était anciennement Maestro, le Seigneur du Son, le Roi Musical, trahi et piégé par son frère, lobotomisé à la connerie, rendu deux fois amnésique, transformé en débile alcoolique et jeté dans les champs de bataille. Ce qui tombait bien, c'est que la Princesse du Son – et par la suite tout le reste de la famille – est présente avec le groupe de joueurs. Il fallait d'abord cacher ce fait choquant pour la Princesse assez distinguée, ayant une haute opinion de son père disparu, mais suite à une révélation des plus...détonnantes (comprendre : durant un repas entre les joueurs et les Seigneurs alliés, un joueur a dit au sujet de la famille du Son qu'ils avaient la fille...et aussi le père) tout le monde ou presque est au courant. Il s'agit maintenant de transformer de nouveau Lionel en Maestro, pour bénéficier d'une force de frappe supplémentaire...mais le jeu diplomatique est compliqué, vous savez...

 

  Voilà un PNJ que j'adore. D'abord présent pour prêter à rire, il devient un véritable ami, un peu bête mais pas méchant. A force, je me suis dit : "il faut que j'en fasse quelque chose !". Il se trouve qu'il était roux de chez roux, tirant sur le rouge pétant, explosif, et que la Princesse du Son avait exactement la même couleur de cheveux...Hasard heureux, j'ai sauté sur l'occasion pour donner encore plus de fond et de profondeur au personnage, qui devient un challenge inévitable pour le groupe. Ce qui me plait dans cette évolution, c'est que les joueurs ont pris le temps de le connaître, et quand ils pensaient tout savoir du type, j'ai sorti la bombe qui a explosé sur la Table...et qui a fait rire tout le monde.

 

  Ce que je retiens avec Lionel, c'est d'abord que n'importe quel PNJ peut être intéressant, à un moment ou à un autre, donc qu'une campagne fourmillante de PNJ est quasiment infinie. Ensuite, le principe du cheval de Troie, la bombe à retardement, est un procédé que j'adore. Il faut le diversifier pour toucher à toutes les formes d'actions dans les intrigues. Lionel est pour l'instant cloué dans la peau d'un pilote cinglé cumulant à 4 de QI, mais il ne tient qu'aux joueurs de changer cela...

 

 

La question qui m'obsède depuis : comment vont-ils rendre Maestro à Lionel ?

Le PNJ-Dieu

Mardi 6 Mai 2014

  Il est tentant pour un MJ d'asseoir sa domination sur les joueurs, de leur dire "mes amis, votre niveau est déplorable à côté de mon personnage..." tout en se limant les ongles d'un air supérieur. Tous les univers permettent de placer un personnage qui est au-dessus du lot, du commun des mortels, au-dessus de tout, et qui regarde les joueurs d'un air mélangeant pitié et méprise. On appelle ce démotivateur vivant le PNJ-Dieu.

 

  Le PNJ-Dieu est le pire ennemi du joueur. Qu'il soit le mal incarné ou un bon samaritain, le joueur se sentira toujours inférieur, rabaissé, et il y aura de bonnes chances pour qu'il le déteste cordialement ou ouvertement, jusqu'à risquer la vie de son personnage pour une fois, juste une seule fois au cours de la partie ou de la campagne, se placer à la hauteur du PNJ-Dieu et lui cracher au visage.

Le MJ peut alors jouer là-dessus. Si le PNJ est à peu près pensé et conçu pour être approché, il peut servir différemment, comme un moteur pour un joueur qui veut atteindre son niveau. Comme un maître, un mentor, un professeur, voire un ami. Le PNJ n'est pas forcément quelqu'un de mauvais, ou d'arrogant. Sa puissance peut servir le groupe, et lui-même peut l'aider à monter de partie en partie, jusqu'à faire jeu égal avec lui. Il sera un levier pour faire bouger vos joueurs, un moyen de les envoyer à l'entraînement sans qu'ils rechignent, et il permettra d'inclure davantage d'intrigues au sein de votre univers (passé, connaissances, techniques, etc).

 

  De la même manière, le PNJ-Dieu complètement antipathique sera aussi un levier, mais dès que les joueurs auront l'occasion de le tuer, ils le feront. Et là, le risque de faire un combat non plus entre les personnages, mais entre le MJ et ses joueurs, est grand.

 

  Si le MJ sort Edmond Tripatort, un mercenaire dans une exo-armure assistée qui manie aussi bien la gatling lance-roquettes que le katana enduit de poison, doté d'une suractivité sensorielle et d'un QI avoisinant les 4000, chef d'entreprise milliardaire et orateur hors pair, possédant une barre de vie aussi longue que la cordillère des Andes, que feront les joueurs face à lui ? Mourir, rendre leur fiche, rigoler en regardant le MJ prendre son pied avec son personnage imbattable. Au choix.

 

  Le MJ peut aussi sortir Edmond, ce brave type, qui est certes fort et se prend pour la réincarnation de Satan sur Terre, mais lui donner des faiblesses bien cachées, visibles par les joueurs sur quelques lancers de dés, ou simplement dans le RP. Tiens, ils apprennent qu'Edmond a une mère malade qui a besoin de soins ? Edmond tente de cacher une fille pour la protéger de ses ennemis et de lui-même ? Edmond a une maladie incurable qui nécessite de prendre ces seringues, précisément ? Il y a un secret autour de son enfance passée au Pakistan ? Il y a dix milles façons de jouer un PNJ-Dieu qui en réalité n'est qu'un PNJ d'apparence divine, mais qui est réellement vulnérable. L'essentiel à faire, pour le MJ, est d'accepter d'être vulnérable, de créer un personnage aussi puissant qu'il est atteignable, et de laisser les joueurs traquer les faiblesses de ce dieu vivant pour le faire chuter à partir de ses pieds d'argile. A ce moment, les joueurs verront qu'ils sont certes faibles dans cet univers, mais qu'ils sont tout de même capables, en réfléchissant et en se concertant sur les failles exploitables, de faire chuter une montagne.

 

  Cher MJ, il s'agit donc de donner, à travers le PNJ-Dieu, la terreur et l'imposante force de ta toute-puissance. Mais n'oublie pas que l'espoir, comme la haine ou l'admiration, est un puissant sentiment qui anime les joueurs, et qui parfois amène à te surprendre.

PNJ n°3 : Joy, esprit frappeur et dieu imprévisible

Mardi 6 Mai 2014

  Dans la campagne de Dreamland, Joy est mon PNJ-Dieu favori. Il allie à la fois la toute-puissance et l'indifférence, l'imprévu et le danger. Quand il apparaît, les joueurs commencent à avoir peur (enfin je crois). Impossible de savoir pourquoi il est là, ce qu'il va faire, quels sont ses buts...mais il est là, avec sa monstrueuse puissance, pour barrer la route des joueurs, et surtout de l'un d'eux, qui porte le même visage que lui...(inclure ici musique à suspens)

 

  Joy, il faut le savoir, connaît du beau monde. Proche du Seigneur déchu de la folie, il possède, suppose-t-on, une partie de son pouvoir. Ce Seigneur était auparavant la deuxième créature la plus puissante de l'univers du jeu de rôles, je vous laisse donc imaginer le niveau. Je suis un MJ qui aime beaucoup les symboles, les images fortes, et quand l'un de mes joueurs est également proche du Seigneur déchu au point de former le dieu Janus (le dieu à deux visages), je ne peux résister à l'envie de lui présenter mon PNJ, qui a le même pouvoir lié à la folie, et qui a exactement son visage, ce qui me permet de lui faire dire qu'il est lui, que les deux sont la seule et même personne. A ce stade de la campagne, nul ne sait où se trouve la vérité...

 

Quel est l'intérêt de ce PNJ-Dieu ? Il allie quelques caractéristiques que j'apprécie beaucoup chez les PNJ importants d'une campagne. Il est mystérieux, ses buts sont toujours camouflés, ce qui guide les joueurs vers des enquêtes difficiles. Il est indifférent et semble désintéressé du moindre étalage de force (ou presque, il faut se défendre), ce qui déstabilise toujours les joueurs dans un cadre de jeu de rôles où un bon adversaire est un type mort. Il joue avec les pensées et les intuitions des joueurs, qui sont à la fois amusés, perdus, dupes ou incrédules face à lui. Vous remarquerez qu'à aucun moment, je ne parle de domination, de puissance ou de démonstration de force excessive. Un PNJ-Dieu, à mon sens, n'est valable que si les joueurs peuvent le battre, le connaissent, savent qu'ils vont l'affronter, s'ils sont préparés...Avant cela, il s'agit de placer du mystère, de l'incompréhension, une dose de fascination, aussi, peut-être, pour lancer une enquête qui sera éventuellement une des clés de la campagne. Mais à aucun moment, et c'est là l'important, Joy n'est là pour montrer à quel point les joueurs sont faibles et insignifiants. Au contraire, ils sont parfois meilleurs que Dieu sur Terre.

PNJ n°4 : Avec les compliments de l'Oratorio

Mardi 6 Mai 2014

  Cette phrase...cette phrase hante mes joueurs sur la campagne Dreamland depuis qu'un membre de l'Oratorio est apparu devant eux. L'Oratorio, c'est un principe classique dans un jeu de rôles développé dans une campagne, mais qui marche à chaque fois. Il s'agit, dans mon cadre, d'une organisation secrète très puissante qui oeuvre dans les coulisses pour parvenir à des fins qu'elle seule connaît et pourrait justifier. Le niveau de chaque membre est impressionnant, et le nom de l'organisation est réputé dans tout l'univers...autant dire que les joueurs ne font pas les malins quand ils entendent une femme de ménage en haillons dire la phrase de fin de mission de l'organisation "avec les compliments de l'Oratorio" qui signifie que depuis le début, ils sont surveillés et ils dansent dans la main de l'organisation.

 

  Est-elle bonne ou mauvaise ? Nul ne le sait. Combien de membres possède-t-elle ? Entre 50 et 100, en vérité personne ne le sait vraiment. Qui peut y rentrer ? Aucune information sur le sujet. La moitié de ses membres n'est sans doute jamais apparue à la face du monde, et agit dans l'ombre, dans l'anonymat. J'adore placer du mystère et un sentiment de paranoïa plus ou moins prononcée autour de la Table, pour dire aux joueurs : "tout ce que vous faites, dans cette ville, est su. Tout ce que vous entreprenez est surveillé par des entités bien supérieures". Certes, elles ne se montreront jamais, peut-être, mais l'idée est là, elle est ancrée, et tous les joueurs surveillent ce qu'il se passe derrière eux.

 

  En tant que MJ, le principe de l'organisation secrète n'a que des avantages. Vous pouvez à loisir :

 

  - Placer tous les personnages

  - Surprendre vos joueurs en les plaçant

  - Accumuler les PNJ-Dieu

  - Créer une force de frappe intéressante, des personnages intéressants

  - Développer des pouvoirs complètement originaux

  - Faire vivre votre univers

  - Rajouter des intrigues, des complots, bref des histoires en plus pour donner du fond au jeu de rôles

  - Guider les joueurs, en bien ou en mal

  - Décider de l'orientation de l'organisation selon ses actions

  - La placer politiquement, militairement, socialement...

  - La gérer dans les coulisses de vos scénarios. Pourquoi ne serait-elle pas à l'origine de tout ?

  - La faire apprécier petit à petit à vos joueurs, ou la faire détester

 

  J'insiste, puisque nous avons parlé du PNJ-Dieu, sur la nécessité de contrôler l'organisation. Si elle s'impose au joueur comme un poing qui s'abat sur un gâteau à la crème, il n'y aura aucun intérêt. Oui, elle est puissante et expérimentée, mais si elle dégoûte les joueurs, si elle est là pour montrer que le MJ crée des personnages puissants, qui eux valent le détour, c'est raté. Le MJ doit se contenir dans son envie de toiser de haut les joueurs, de montrer la puissance de son univers, ou même de se comparer à ses joueurs. La chose est tellement facile qu'elle en devient rapidement inutile...Non, il s'agit plutôt de varier les plaisirs, de donner à la fois de la tension, du suspens, de la colère, de la vengeance mais aussi des sentiments positifs. L'organisation secrète pourrait très bien se lier avec les joueurs, ou la trahir, la vendre, ou finir le jeu à leurs côtés...tout dépend de vous, et des actions de la Table. Le principal est de garder une ligne de conduite stable, et de respecter toujours les personnages qui vivent dans votre univers. Vous n'aimeriez pas avoir en face de vous des prétentieux insupportables qui vous regardent comme un gamin futile ? Vos joueurs non plus.

La Ville vivante !

 

Samedi 20 septembre 2014

Nous allons parler aujourd'hui d'une idée développée par John Wick dans son ouvrage Dirty MJ, dont la critique est disponible sur le site. C'est pratiquement la seule bonne trouvaille du bouquin, celle qui justifie le prix de 15 euros pour 90 pages.

 

 

La Ville Vivante, késacko ? C'est assez simple sur le papier : vos joueurs évoluent dans un huis clos, une ville fermée, un microcosme de PNJ et de décors très particuliers. Leurs personnages suivent un scénario et sont ballottés entre les PNJ et leurs objectifs.

Jusque là, c'est une partie normale. Sauf que vous leur donnez, au début de la partie, des PNJ essentiels de la partie, à jouer selon leurs imaginations plus ou moins débordantes. Ces PNJ peuvent être très développés ou tout juste décrits, très précisément conduits par le MJ ou laisser en roue libre pour donner plus de place à l'improvisation.

 

Leurs fiches peuvent contenir :

 

- nom, prénom, adresse, âge, taille, poids

- métiers, rôles, hobbies, caractère

- désirs, secrets, affinités, passés troubles

- techniques de combat

- alliances officielles ou officieuses.

- des détails plus précis, comme l'XP, les points de vie, des statistiques. 

 

Votre partie prendra la tournure que vous voudrez, d'après le traitement de ces PNJ. S'ils sont entièrement donnés, les joueurs marcheront dans vos pas. S'ils sont laissés volontairement dans le flou, les joueurs pourront en profiter pour leur donner d'autres particularités, des mimiques, des expressions et des caractères bien différents de ceux marqués sur la fiche.

 

 

Pour ma part, j'apprécie le concept de la Ville Vivante quand tous les PNJ sont liés ensemble. Des liens/histoires entre tous, des secrets qui les concernent, et qui influeront sur la campagne. J'ai deux systèmes : un qui propose une résolution de l'intrigue par l'évocation des secrets.

L'autre système propose un fonctionnement par des dés de pénalité si les secrets sont révélés à un moment inopportun. S'ils arrivent à point nommé, les pénalités sont enlevées. Cela peut aller de 2 à 12 dés forcément négatifs pour le groupe, ce qui incite à faire attention, à garder les secrets (un peu trop, sans doute), mais également à mieux visualiser les personnalités en présence, le fonctionnement d'un scénario, les raisons des comportements, et comment des PNJ peuvent rendre une partie inoubliable.

 

Bien sûr, cela suppose une confiance en ses joueurs, et des joueurs qui ont l'âme théâtrale, le sens de l'improvisation, et qui savent se jeter à l'eau sans savoir si elle est froide ou non. Cela demande aussi au MJ de lâcher sa partie, son scénario, pour laisser ses joueurs la construire ou la détruire.

Vous pourrez adapter un système de dés pour tenir la bride de vos joueurs, ou au contraire laisser le sort de la partie à leur bon sens, ce qui représente toujours un danger...

Le monde en mouvement !

 

Samedi 20 septembre 2014

Élargissons maintenant le concept de John Wick.

Certains jeux de rôles présentent tout un monde jouable, des partis politiques, des pays gouvernés par des tyrans ou des émissaires de la paix, des missionnaires du bien commun ou le descendant du Diable incarné. Dans un monde ultra-ouvert, soumis aux volontés politiques d'une poignée de personnes, pourquoi ne pas jouer ces personnes ?

 

Les fiches des personnages, rois, empereurs, présidents, leaders sont du même ordre :

 

- nom, prénom, adresse, âge, taille, poids

- métiers, rôles, hobbies, caractère

- désirs, secrets, affinités, passés troubles

- techniques de combat

- alliances officielles ou officieuses.

- éventuellement une chronologie politique de tous les évènements comprenant tous les acteurs. 

 

Mais il faudra ici, évidemment, insister sur les désirs, les passés troubles peut-être, les affinités, le caractère et le jeu d'alliance. Le principe est le même, mais vous jouez à House of Cards ou Game of Thrones...tout en faisant jouer les personnages au sein d'un univers qu'ils auront eux-mêmes créé, dirigé, choisi. Deux personnages à gérer, dont l'un décide de l'avenir d'un pays, d'un continent ; il peut choisir la guerre ou la paix, discuter affaires dans les corridors.

 

Pour ces discussions entre les personnages, il y a deux façons de procéder (voire davantage, celles que vous pouvez inventer par vous-mêmes !) :

 

 - En début de partie, les joueurs prennent dix minutes pour décider des actions des dirigeants.

 - En fin de partie, le MJ divulgue les principales informations politiques, les conséquences visibles des actions invisibles.

 

Des apartés peuvent être demandés entre les PJ politiques. En dehors du jeu de rôles, des heures de jeu, les joueurs peuvent discuter entre eux pour parler de leurs avenirs politiques et des affaires en cours. Le MJ n'a pas à contrôler, les joueurs jouent à fond leurs personnages et réfléchissent à leurs actions.

 

Bien sûr, ça suppose une certaine confiance accordée aux joueurs, puisque le MJ confie les clés du JdR. De plus, un certain fair-play est attendu. Les joueurs peuvent faire des coups bas, des intrigues qui traînent dans la boue le plus sage d'entre eux, mais garder à l'esprit que les secrets et les intrigues font le jeu. Cela demande peut-être une maturité, ou plus simplement un esprit de jeu rigoureux, qui ne cède pas aux tentations ou à la facilité.

 

Prenons un exemple dans Game of Thrones. Si le jeu de rôles propose de jouer les familles, imaginons que les joueurs peuvent incarner des mercenaires à Port-Real, mais aussi des membres de chaque famille importante de Westeros. Ainsi, les mercenaires seront soumis à l'action politique des souverains, les joueurs se feront jouer par eux-mêmes. Ce qui pourra ajouter un piment supplémentaire, et une motivation, une immersion dans le scénario qui seront décuplées.

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