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Premières approches

Mardi 11 Mars 2014

  Une partie de jeu de rôles se prépare, même si elle est improvisée. L'important, pour le maître du jeu, est de montrer à la table qu'il sait où il va, qu'il est paré à toutes les éventualités, évènements et décisions que feront ses joueurs. Il faut qu'il soit non seulement un guide, mais un guide assuré qui ne laisse pas de place au hasard – du moins dans les apparences.

 

Pour cela, je vais commencer par les bases. Quel que soit l'univers choisi, il y aura toujours des bases sûres et efficaces pour une partie.

 

  Tout d'abord, habiter l'univers choisi. Le maître du jeu doit au préalable se plonger dans le cadre de son jeu. Il doit parcourir les rues des villes, les champs et les chemins des campagnes. Il doit saisir l'ambiance d'un bar, d'un marché, d'un palais. L'immersion est fondamentale dans la préparation d'une partie, le MJ est celui qui raconte une histoire qui est située spatialement, dans un lieu donné, qui répond à des réalités qui doivent être énoncées, précisées. Pourquoi pas ne s'intéresser de près à cette maison délabrée en dehors de la ville, qui fait peur aux enfants ? Pourquoi ne pas élargir la famille du barman du quartier à celle du maire qu'il déteste ? Comment expliquer l'absence de femmes la nuit, dans un quartier pourtant populaire ? L'environnement dit quelque chose du scénario, et chaque élément du décor est un indice pour les joueurs. Le maître du jeu, en se plongeant lui-même dans l'ambiance de son jeu, permet d'extraire le jus qu'il devra servir sur la table.

 

  Ensuite, peupler votre décor. Vous entendez ? C'est l'heure de faire rentrer les PNJ ! Le barman qui déteste le maire, le maire, la femme du barman qui sur le marché crie contre la politique du maire, tout ce monde vit selon vos besoins, votre envie, selon le scénario choisi. Les PNJ font vivre votre partie, alors qu'en réalité, si on regarde calmement...vous n'avez rien fait.

 

  Le plus beau est à venir, car vous êtes un MJ un peu fumiste. Au moment de penser au scénario, un ami vous appelle pour aller boire un coup. Qu'importe ! En chemin, vous assurez votre jeu sur des évidences. Bien sûr, les joueurs se douteront qu'il y a des serveurs dans un bar, des marchands dans un marché, et des conseillers autour du maire. Nul besoin de leur donner une personnalité, ni même une identité. Ils sont là, anonymes, ils travaillent, boivent un verre...et bossent pour vous, sans le savoir. Ils sont là pour faire la figuration, et votre cadre de jeu est fixé. Aucun effort, résultat garanti.

 

  Mais vous êtes un peu sérieux. Tout de même, ce barman et ce maire, ce sont de sacrés personnages ! Allez, vous faites deux petites fiches pour eux. Age, nom, profession, caractère, contacts, secrets. Vous commencez, tel un démiurge jubilant devant sa création, à faire le moule de vos personnages. Ils naissent doucement, et font naître l'intrigue. Ils sont là, prêts à recevoir les joueurs, selon ce que j'appelle des stéréotypes efficaces. Par exemple, le barman est bourru, mais c'est un brave type. Le maire est mielleux, agréable, mais il n'hésite pas à supprimer ses opposants en coulisses. Trop manichéen, dites-vous ? Mais sachez que le maire aide financièrement l'orphelinat de la ville à survivre, et le barman tue des bébés chats le soir dans sa cave...Ce que je veux dire, c'est que les personnages auront des réactions précises, attendues, et vous dirigerez par ces caractères les joueurs de telle ou telle manière. Au final, la décision et l'action seront entièrement entre leurs mains tremblantes.

 

  Ensuite, il faut ce qui est pour moi un rituel dans une partie...je parle évidemment des combats, des conflits, des affrontements entre l'univers et les joueurs, ces parfaits touristes qui arrivent comme une fanfare hyperactive dans un village paisible et prospère.

 

  Il faut déployer votre troisième carte des PNJ : les obstacles qui sont armés, dangereux, et qui sont là pour régler le sort de tous les personnages. Là, vous avez tout le loisir d'imaginer les pires mercenaires sanguinaires, ou alors les sous-fifres du maire, un peu idiots, un peu méchants, qui font ça parce qu'il faut bien faire quelque chose. Il reste à les placer au moment opportun, et vous voilà parti pour un temps indéterminé, qui déterminera la réussite ou l'échec du groupe.

 

  Il vous reste la résolution de la partie, le dénouement, les récompenses diverses et le repos du guerrier. Vous enchaînez sur d'autres intrigues de cette manière, vous prenez vos joueurs par la main sans qu'ils le remarquent du bar jusqu'au marché, où ici une marchande a perdu Popignette, son chat qui possède un collier avec son nom. Tiens, c'est bizarre, mais le barman a parlé de chats qui le gênaient le soir...je sais c'est pas vraiment palpitant, mais l'idée est là.

 

Alors, à votre avis, quel était le lien entre le maire et le barman ?

 

Le schéma d'une partie

Mercredi 12 Mars 2014

  J'ai abordé d'une manière simple le déroulement possible d'une partie, qui place un univers, des personnes qui résident en son sein, et des actions qui s'y déroulent. Le rôle que le MJ assure avant la partie, c'est donc imaginer toutes les actions – ou plutôt les interactions – que les personnages réaliseront pour arriver à leur(s) but(s). Plus simplement, il s'agit de se représenter succinctement toutes les discussions possibles, qui amèneront les décisions.

 

Pour faciliter la compréhension, je vous montre ce schéma

  Retenez bien ce schéma, car en tant que MJ, un certain nombre de vos parties en respectera les différents composants. Ce qu'il faut créer, anticiper, jouer et développer, ce sont les liens, ici les flèches, qui seront les actions, les discussions, les phases de combat et de réflexion.

 

  Bien sûr, ce schéma n'est qu'une base. Vous pouvez multiplier les schémas, les placer à une grande ou une petite échelle (sur un village ou sur un pays, sur une organisation secrète ou sur un groupe de rock en devenir). On peut aussi trouver d'autres façons de jouer, on peut se séparer des actions entendues, des quêtes linéaires, des objectifs à suivre après des combats/rencontres/négociations. Mais je le répète, la base me semble tout à fait correcte pour débuter une partie en tant que MJ, ou démarrer une campagne. Le reste (l'univers, les PNJ, l'intensité de la partie) ne dépendra que de vous.

 

  Le schéma représenté a été créé par Algirdas J. Greimas, et porte le nom de schéma actantiel. Signe que vous proposez un récit nouveau, et que le MJ emporte ses joueurs dans son histoire.

 

Le confort des sens

Mercredi 12 Mars 2014

  J'ai parlé de l'immersion dans le premier sujet, je vais maintenant développer un point essentiel pour vos joueurs : le confort par les sens dans une partie.

 

  Les sens sont très importants pour les joueurs. Ce sont eux qui permettent d'imaginer la scène, d'imaginer ce que les personnages voient, goûtent, sentent, ressentent, entendent. Un joueur affûté pourra jouer avec, demander ce qu'il ressent, ce qu'il voit, durant toute la partie, pour fonder son jeu sur une acuité excellente, un odorat de limier, et se placer comme un membre du groupe inévitable.

 

  C'est donc à vous, dans la préparation de la partie, de construire non seulement un décor, une ambiance, mais d'y joindre leurs effets sur les sens des joueurs. Et, puisque nous sommes entre nous, je vais vous livrer un secret....Plus les cinq sens des joueurs sont stimulés, plus ils se sentent à l'aise, dans le contrôle, ils se sentent pleinement possesseurs de la scène ou de la séquence. Par contre ne leur donnez que la vue dans un endroit mal famé, et ils se focaliseront sur elle, commenceront à changer leurs actions, pour se précipiter davantage, et commencer à faire des erreurs. Ma recette, pour inscrire une ambiance accueillante ou hostile, est de minimiser leurs sensations ou au contraire de les augmenter, de leur donner du grain à moudre.

 

  Pour vous rendre compte de cet effet en jeu, prenons un exemple. J'ai fait une petite session avec un de mes joueurs récemment, il devait retrouver un objet qu'une mafia lui avait volé. Il savait qu'elle occupait un bar dans la ville, mais il n'avait aucun renseignement. Astuces entre MJ : c'est toujours dans ces moments que vous placez les obstacles futiles, c'est-à-dire des PNJ bagarreurs ou des évènements impromptus dans les autres bars. Et votre session ne ressemblera plus à une quête linéaire, mais une quête désespérée et fatigante alors que le personnage n'a fait que la tournée des bars... Dernier conseil : beaucoup d'établissements ont un nom. C'est un classique des jeux de rôle que de donner de noms qui donnent des indices sur l'endroit fréquenté.

 

  Premier bar...Il s'appelle La Brasserie du Ciel (ils servent de la bière de nuages) Très fréquenté (vue), donc très bruyant (ouïe), les bières sont bonnes, diversifiées, la nourriture est correcte (goût/odorat). Le bar a un décor accueillant, les serveurs viennent immédiatement voir les clients, il y a de la place, etc (toucher). Cet établissement donne envie d'aller parler au gérant, aux serveurs, voire de parler avec les gens. Vous l'avez patiemment décrit, vos joueurs se sentent choyés, à l'abri, à l'aise. Selon votre niveau de méchanceté, vous pourrez placer un bagarre générale qui va saccager le bar, parce que le personnage, un peu trop à l'aise peut-être, aura maté une femme venue avec son mari. Mais le principal, c'est que le joueur évolue dans ce décor qu'il apprécie simplement en s'imaginant le fumet des cuisines.

 

  Deuxième bar. Il a comme nom La Danse du Son. Fréquenté par une clientèle d'habitués, il s'agit d'un bar proposant du flamenco, du jazz, du métal, du classique, selon les périodes et surtout les envies du patron, un mélomane (ouïe + PNJ). Le bar a un décor assez riche, avec des pochettes d'albums, des photos d'artistes, des dédicaces, des instruments (vue). Les sièges sont confortables afin d'apprécier la musique, par contre on évite les cocktails et on prend des vins ou de la bière (goût et toucher). Ce bar est très sympa, à n'en pas douter, mais correspond à un bar de quête. Il est peu probable qu'un personnage y aille de sa propre volonté, mais par contre si l'intrigue tourne autour de la musique, d'une danseuse, d'un instrument ou un morceau perdu, c'est une piste. D'ailleurs il est vraiment passionné ce patron mélomane, vous n'avez pas trouvé ?

 

  Troisième bar. Le Cumulus Club. Très fréquenté par des jeunes bruyants insupportables, on n'entend pas la personne qui nous accompagne (pas d'ouïe). On y sert des cocktails qui ont fait la réputation de l'établissement (goût), du coup il n'y a jamais de place (toucher bloqué). L'avantage, c'est que les jeunes un peu bagarreurs, en mal d'aventures, s'y retrouvent pour se créer des ennuis ou des amours (vue). Le Cumulus Club, c'est le type de bar bondé qui ressemble à un sauna hystérique. Vos joueurs là-dedans vont y rester (peut-être comme vous dans un vrai bar) cinq minutes, le temps de faire ce pour quoi ils sont venus. Le bar à cocktails se transforme en corvée...et ils doivent aller parler à un jeune qui est là très souvent avec sa bande, pour le convaincre de reparler à sa mère malade.

 

  Quatrième bar. Son nom est Le Nuage Purulent. On commence à sentir la différence entre les quartiers de la ville, je ne vous le cache pas. Le Nuage Purulent, c'est ce bar où vous prenez l'alcool le plus fort du patron pour nettoyer votre verre. Le bar qui a échappé à tous les contrôles, et d'ailleurs certains disent que le rouge qui tâche a un goût de sang de contrôleur sanitaire...bref, quand les joueurs entrent dans ce bar, ils savent qu'on y sert pas du Lactel en petite bouteille (quoique...). Non, dans ce bar, on y sert de la Purulette, l'alcool maison qui a la particularité de donner l'impression d'une descente d'organes...le patron en est très fier (je vous laisse situer le confort du goût). Le décor ? Assez simple, de préférence obscur et négligé. Vous pouvez rajouter des détails croustillants, comme les crachoirs qui servent de dépôts à vomi, le sang tâchant le sol...bref, l'endroit dit aux joueurs « les gars, ce bar aurait pu s'appeler la Roulette Russe...qui veut tirer en premier ? ». Le décor n'est pas commode, mais on considère que les clients ont tous des mines hostiles, avinées...ils sont dangereux. Peu de discussions...paradoxalement, ça peut devenir inquiétant. Les joueurs éviteront de toucher les tables ou de s'asseoir, de peur de choper une infection. Ils ne peuvent que compter sur la vue, partiellement d'autres sens qui leur donneront des signaux...je rappelle que la Purulette est une bouillie marron qui clapote et qui sent l'algue.

 

  Dernier bar. Il porte le doux nom de Goulot Syphilitique. Il y a sûrement une excellente raison pour justifier le nom de ce bar, à vos joueurs de tenter le diable ou pas. A vous de trouver la raison la plus débile, folle, sale, drôle...ça donnera déjà le ton. Ce bar, c'est le bar hostile par excellence. Les joueurs rentrent, tout le monde les regarde. Un « étranger » clignote au-dessus de leurs têtes. De suite, vous bloquez leurs quatre sens pour les concentrer sur la vue. Intimidation. Ici on ne rigole pas, et le nom du bar ne fait plus rire. Les types qui sont sur les tables sont ouvertement armés, parlent en silence et ont les yeux injectés de sang. Le patron est charismatique, parle mal et montre clairement que le groupe est composé de guignols. Malaise général, maintenant il faut discuter... Il n'est même plus question de verres sales, d'alcools originaux, de bagarres, d'inconfort. Le bar représente un danger, car tout ce que les yeux virtuels des personnages voient, c'est leurs morts imminentes s'ils osent s'asseoir. C'est fort dommage, car la spécialité de la maison, le Bloody MST, est un régal selon les rares habitués à peu près normaux. Il est évident que ce bar là accueille la mafia...d'ailleurs, dans le fond de la salle, des types franchement louches font des allers-retours entre deux portes, et ne serait-ce pas des hurlements qu'on entend venir du sous-sol ? Santé...

 

  Pour faciliter l'immersion, jouer sur les sens de vos joueurs, apprenez à stimuler tel ou tel sens pour pouvoir leur donner des indices, les pousser à tel endroit, ou leur donner des signaux quand ils entrent dans une zone de dangers imminents. De plus, en créant des ambiances jouant sur les différents sens (sans qu'ils le remarquent, c'est votre travail), en lançant des détails précis et des PNJ variés, ils se souviendront de leur partie en souriant, et en se rappelant les négociations pour trouver la base de la mafia.

 

D'ailleurs, à votre avis, dans quel bar était-elle ?

 

A quelle partie se vouer ?

Jeudi 13 Mars 2014

  Tout est prêt. Vous avez le cadre, l'univers est dans votre main capable de déchaîner le chaos sur les joueurs, vous avez quelques idées de PNJ, d'intrigues, de combats, mais vous séchez sur le déroulement de votre partie. Quel chemin prendre ? Comment orienter la fougue de la table ? Est-ce que la petite fille qui lance la partie sur des affaires de meurtres chez le marchand de sucettes est vraiment nécessaire ? Beaucoup de questions viennent au moment de structurer le scénario, qui doivent être rapidement réglées car, comme je vous l'ai dit, vous devez montrer aux joueurs que vous avez le contrôle, et qu'aucune faille n'est exploitable.

 

  La première action pour vous, lors de la création du scénario, est la projection dans votre propre partie. Se mettre à la place du joueur, et penser à des réactions possibles, sont les deux clés de voûte d'une construction de partie. Vous ne voudriez pas vous retrouver sur un champ de bataille de guerriers vétérans sans pitié alors que vous vous battez avec une épée rouillée ? Vos joueurs non plus. Selon la formule bien connue « ne fais pas à autrui ce que tu ne voudrais pas qu'on te fasse », le MJ doit penser la partie en pensant avant tout à ses joueurs. Le jeu de rôles est un divertissement, pas une séance de torture ou un peloton d'exécution...ce qui ne signifie pas que vos joueurs ne doivent pas souffrir, bien au contraire ! Mais il y a la souffrance qui abat et celle qui permet de se relever ; la douleur qui détruit un personnage, et celle qui le fait se transcender.

 

  Nous pouvons maintenant nous concentrer sur le mouvement à donner à une partie. Avant toute chose, il s'agit de donner un fil directeur que les joueurs suivront patiemment, convaincus de votre hypocrite bienveillance envers eux. C'est là le choix le plus difficile, en réalité, car il détermine la nature même de la partie. Vos joueurs aiment les enquêtes, ou plutôt les bastons ? Plutôt quêtes d'objets, ou gestion de ville ? Si vous débutez et que vous voulez faire plaisir à la table, demandez simplement ce qu'elle veut faire. Les joueurs ont des préférences, des envies, des espoirs à réaliser dans un jeu de rôles. Il ne sert à rien, pour le MJ, de se faire plaisir en sortant un scénario de guerre sous-marine, alors que vos joueurs sont des fanatiques de Pearl Harbor, n'est-ce pas ?

 

  Maintenant, vous voulez absolument faire votre guerre sous-marine, soit. Pourquoi pas, après tout, vous avez de bonnes références, des idées, et cette envie inexplicable de plonger vos joueurs dans les océans fourmillants de vie, de prédateurs et d'épaves remplies de trésors que convoitent de grands musées et des pilleurs. Rien n'empêche de modifier spécialement pour les joueurs quelques idées qu'ils avaient, de leur donner du rêve aérien par procuration marine, et surtout de les surprendre, les amuser, les tirer par la manche pour leur montrer qu'en fait, les fonds-marins sont tout aussi amusants que les nuages et l'azur parfait.

 

  Une partie se lance de plusieurs manières. Par le dialogue avec vos joueurs, par les diverses idées, échos, intentions qui vous traversent, par votre confiance en la réussite du scénario. Il s'agit surtout d'éviter de jouer tout seul, d'écrire en se faisant plaisir. Se projeter au milieu des rires et des moments de tension, pour entendre à la fin de la partie « vivement la prochaine, parce que celle-ci était géniale! », est la meilleure récompense du MJ.

 

  N'hésitez pas à demander à vos joueurs ce qu'ils ont particulièrement aimé et détesté, les points à changer, dans le jeu et autour de la table. C'est ainsi que toutes vos parties seront (presque) parfaites, et que vous deviendrez un MJ appréciable.

 

  NB. Nous ferons avec Nistray un article à deux voix sur les différents types de partie, conçu comme un catalogue, avec nos avis pour chacun. Suite dans le No Man's Land. 

 

La première fois

Lundi 21 avril 2014

  Ca y est, vous y êtes...vous avez annoncé à votre bande d'amis ou votre groupe de rôlistes que vous vous lancez dans le meujeutage (action de faire le MJ, ou masterisation). Vous avez la motivation, vous voulez leur donner du rêve, de l'action et une gloire qu'ils ne trouveront jamais plus chez un autre MJ ! Seul hic, une fois passés les délires mégalomanes de tout MJ honnête, vous vous rendez compte que vous ne savez foutrement rien sur la façon dont on crée un scénario ! Le stress de la première fois arrive/revient, et vous avez peur d'être nul et que vous joueurs s'ennuient avec vous...Rien de tel qu'une explication sur « la première fois » en tant que MJ, ou plutôt la première création de scénario.

 

  Tout d'abord, il faut savoir dans quoi vous mettrez leurs pieds. Une première partie en tant que MJ est souvent faite dans une visée de MJ, rarement de joueurs. On peut facilement louper une partie, a fortiori la première, quand on ignore qu'on l'écrit pour des joueurs, et que ces joueurs, avec toute leur sympathie, seront aussi critiques, juges, et ne reviendront peut-être pas à la prochaine...Je ne vais pas répéter ce que j'ai dit dans d'autres articles, mais j'insiste sur le plaisir que le MJ procure aux joueurs. Un MJ n'est pas là pour se faire plaisir en solo ; il peut le faire, si son amusement est parallèle à celui de ses joueurs. Mettez-vous à la place de vos joueurs, ressentez chaque action comme si vous la vivez, et cela vous évitera de vous diriger dans une mauvaise direction dès le départ.

 

  Ensuite, un conseil que j'adresse car je le crois le plus utile : préparez tout minutieusement. Ecrivez jusqu'à maltraiter votre fichier texte/feuille, faites des erreurs, questionnez-vous sur ce que vous écrivez, mais couchez tout le scénario sur le papier. L'introduction, les PNJ inutiles, les achats, les prix, les rencontres aléatoires – je les écrivais toutes, avec pour chacune les résultats au dé 6 associés. Oui, ça prend un temps important, mais il n'y a pas de couac, et vous êtes sûrs du chemin à suivre. Décrivez pour vous uniquement les rencontres, les combats, les techniques employées. Bien sûr, il y aura toujours une part d'inconnu, d'improvisation. C'est pourquoi quand j'écris mes scénarios, notamment au moment des résolutions d'intrigues ou quand il faut interroger CETTE dame précisément (une brave institutrice qui sait où habitait Pimousse Joe, le serial killer en cavale que le groupe recherche), je mets simplement un point d'interrogation, je marque ensuite sur la feuille « à voir, selon les joueurs ». Laissez-vous de petits espaces blancs, que les joueurs guideront durant la partie. Mais n'en faites pas plus de deux ou trois. Vous devrez apprendre à gérer des timings, des tempos, des moments forts et des instants de tranquillité, et ça viendra avec le temps, de manière naturelle. Mais avant ça, il faut tout noter, ne rien laisser ou presque au hasard. Vous sautez du pont en élastique, mais avec deux élastiques...et vos joueurs n'en verront qu'un seul !Cela étant, je n'encourage évidemment pas à la lecture d'un scénario. Vous êtes le MJ, le conteur d'histoire, l'oralité faite homme, hors de question de rester fixé sur une feuille ou un écran d'ordinateur. On peut le faire pour décrire des paysages, des résolutions d'intrigues, mais pas sur tout le scénario. Bref, pour continuer sur la métaphore du titre : sortez couverts !

 

  Certains lecteurs trouveront cela inutile. J'en conviens, certains feront de très bonnes parties en quasi-improvisation, et n'auront aucunement besoin d'avoir 10 pages de scénario au cas où. J'ai un joueur très régulier à ma table qui, quand il est MJ, n'a besoin que d'une page voire une serviette de restaurant sur laquelle il a gribouillé tout son scénario. Ses parties sont très amusantes à suivre, et l'improvisation ne se voit presque pas en tant que joueur (en tant que MJ, je reconnais les endroits où ça pêche mais je salue toujours l'effort...). Je pense que ce n'est pas à la portée de tout le monde, et je préfère la sécurité à l'aventure. Par la suite, c'est quelque chose à tester, véritablement, car les parties en impro ont une autre saveur, mais pour moi une partie préparée a plus de chance de faire mouche et d'embarquer toute la Table dans une histoire construite et cohérente, sans failles de narration ou temps de réflexion du MJ qui ne sait pas comment réagir face à un joueur. Pour une première partie, ne vous faites pas surprendre, ne vous laissez pas mettre en difficulté. Vous devez montrer un contrôle, un fil directeur, une ligne précise. Cela vous permettra de surprendre vos joueurs...par exemple la dame à interroger ne serait-elle pas plutôt un travesti du quartier rouge de la ville ? Ou alors la tante sur-protectrice qui ne connaît Pimousse Joe que sous le nom de Joachim de Valcourt? Vous avez, en écrivant tout minutieusement, le loisir de placer vos personnages et de choisir quelles seront les actions de vos joueurs. Avec le temps, vous apprendrez à lâcher du lest, et à faire une partie écrite, une partie improvisée. Par ailleurs, ne vous leurrez pas...vous pourrez avoir 20 pages de scénario dont 8 sur l'enfance de Pimousse Joe et 4 sur ses relations secrètes avec les hommes au sein de la bonne société américaine, les joueurs pourront tout à fait passer outre et aller voir ailleurs, par exemple dans le collège pour la haute-bourgeoisie de Boston qu'il a fréquenté, et où des meurtres de jeunes éphèbes, dans lesquels il était impliqué, se sont passés...Zut ! cela ne représente qu'une ligne ou deux sur votre scénario...là, vous êtes coincés, et vous allez vraiment découvrir pourquoi le jeu de rôles est si intéressant, et pourquoi être MJ est aussi stimulant !

 

 

Pour dire au final : le petit Joe, dit « Pimousse » à Boston, protège quelqu'un...trouvez-le.

Au commencement était le Verbe...

Lundi 21 avril 2014

  Une citation biblique qui irait bien à chaque début de partie de jeu de rôles, n'est-ce pas ? Tout est parole dans le jeu de rôles, mais nous y reviendrons. Cet article se concentre plutôt sur le lancement d'une partie, son début, les premières paroles échangées au sein de l'univers en pleine naissance. Je donne ici des conseils qui seront forcément critiquables, il ne faut pas oublier que le principal, c'est d'adapter vos jeux de rôles à votre manière, de saisir ce qu'on vous propose, dans n'importe quel cas, et de vous l'approprier.

 

  Pour commencer, l'immersion. Une partie doit débuter dans un cadre précis, qui peut soit être purement artisitique – c'est-à-dire hors du jeu de rôles, mais immersif au possible ; soit un lancement immédiat sur le scénario. Il y a plusieurs recettes :

 

- L'action se déroule à Castel Zumbat, un village issu directement de l'univers médieval fantastique, où des assassinats mystérieux, entourés de magie et de mystère, ont été repertoriés. Plusieurs choix possibles : les joueurs se trouvent dans le train sombre et vide qui mène à la ville, dont les feux de cheminée sont visibles des fenêtres du train / les joueurs sont dans une taverne de la ville, rieuse et avinée, les gens sont sales, grossiers et boivent pour oublier les affaires d'assassinat / les joueurs errent chacun dans la ville, les pas claquent sur les pavés, des femmes jettent les seaux de chambre par les fenêtres, des gardes patrouillent, les rues sinueuses sont propices aux mauvaises rencontres...

 

- Castel Zumbat, bourgade transylvanienne, est réputée pour sa bière brune tirant sur le roux, que des commerciaux venus de la péninsule ibérique ont amélioré et l'ont appelé plus tard Sangria. La ville compte 20 mille âmes et doit son existence à la déforestation, la viticulture et l'élevage de bovins. Peu fréquentée par les touristes, son Château isolé sur le mont Batmahuche est pourtant un monument de l'époque impériale, qui appartient à la famille D'Alucardino depuis plusieurs siècles. Depuis la mort du père, le dernier fils en vie n'a plus été vu au village, mais certains promeneurs ont parfois entendu des cris et des éclats de voix venant des remparts.

 

- Arrivée des joueurs à Castel Zumbat, dans les rues médiévales de la ville, faites d'enseignes, d'étalages, maisons biscornues et odeurs de fumier, un homme se fait assassiner sous leurs yeux, par une silhouette noire, faite de fumerolles, et qui repart en volant vers les toits pour disparaître dans la nuit. Accusés de meurtre, le capitaine de la Milice de la ville parvient à les innocenter, parce que le corps est marqué par deux trous précis sur le cou, marque habituelle sur les corps assassinés ce mois dernier, tandis que les joueurs n'ont rien pour tuer de cette manière, et surtout un témoin les a vu à vingt mètres du corps qui s'affaissait. Le capitaine décide alors, avec l'accord du bourgmestre, de leur confier l'enquête en apprenant qu'ils sont aventuriers, détectives privés, journalistes, policiers...

 

  Ainsi de suite. Je suppose que vous avez compris l'idée du cadre. Une situation, un tableau, une ambiance, et de suite, pour ne pas laisser de blanc dès le départ, des problèmes, des indices louches, des évènements perturbateurs de plus ou moindre grande importance. Un choc, pourquoi pas. N'allez tout de même pas envoyer un boss final dès le départ, pour faire trembler vos joueurs dès les premières minutes. Surtout que selon le réalisme de la partie, une demi-douzaine de miliciens sont aussi efficaces dans l'homicide qu'un boss...Ce qu'il faut désormais conduire, ce sont les pistes qu'explorent vos joueurs, tapissées de péripéties, dangers, discussions. Ce que j'appelle le midgap, le temps le plus long dans une partie, celui du milieu, car c'est durant celui-là que vos joueurs patinent et tentent de trouver le fin mot de l'affaire.

 

Le début de partie peut s'étaler, mais il faut se dire qu'un jeu de rôles, au-delà des rires, des discussions, c'est aussi un mouvement, des actions. Il me semble dangereux de jouer sur un début de partie qui s'étirerait...et c'est valable pour tout moment de la partie. Le travail de MJ demande de l'énergie, car dès l'instant que le Verbe est né autour de la Table, vous lancez et vous êtes lancés pour être toujours dans l'activité.

Gérer son Midgap en milieu hostile !

Lundi 21 avril 2014

  Commence alors la partie la plus difficile et paradoxalement la plus amusante pour vous : vos joueurs en train de ramer pour avancer dans l'histoire. Là, il y a danger ! Selon la disposition de vos indices, PNJ, pistes à suivre, ce qu'on appelle le déroulement de l'histoire avancera plus ou moins efficacement. C'est justement ce qu'il faut gérer, à sa manière, de façon à garder l'enthousiasme du début. Voyons ça de plus près.

 

  Castel Zumbat est en effervescence ! Après une nuit passée dans une auberge assez crade, franchement glauque, à ne pas savoir si des gens se sont réveillés en vie dans les chambres, les joueurs vont commencer à enquêter. Jouez tout d'abord sur le déroulement de la journée et le début des indices. Au petit-déjeuner, le patron peut passer à table. D'autres clients peuvent apporter une conversation supplémentaire. A ce niveau de jeu, contentez-vous seulement de distiller des informations peu utiles. C'est aussi à moment que j'aime placer toutes les pistes possibles, les fausses entremêlées dans la vraie. En fait, si on y regarde de plus près, vous avez, durant le temps du petit-déjeuner, donner toutes les pistes qui seront remontées par les joueurs dans le temps de jeu.

 

Facile à dire, mais à faire ? Voici les pistes :

 

- Le patron de l'auberge affirme faire partie des chasseurs de monstres fantastiques et légendaires. Pour lui, l'assassin n'est qu'une créature avide d'âmes humaines, qui se nourrit par le cou, la colonne vertébrale précisément, siège du maintien de l'homme, qui est pour ce monstre comme une friandise. Il l'appelle Wawapacha, un monstre humanoïde qui a le pelage d'un caniche albinos et qui glapit comme un renard. Il en aurait croisé un au Cambdoge, durant ses années d'étudiant (il se met par ailleurs à parler cambdogien, mandarin et skri-lankais).

 

- Un hôte parle avec l'aubergiste d'un chasseur de vampires qui serait arrivé il y a deux jours dans la région, pour aller tuer le vampire qui terrifie la population de Castel Zumbat. Il serait allé au Château et il n'est plus jamais apparu à la surface de la Terre (les joueurs remarqueront l'énorme pistolet et les balles en argent à la ceinture du bonhomme, ainsi qu'une gousse d'ail et des bourses de sel accrochées à ses vêtements). Il se fait appeler Van Halen, ou quelque chose comme ça, et il attend son fidèle acolyte Rossignol pour aller à son tour au château.

 

- Une dame un peu hautaine affirme que tout a commencé avec l'arrivée du capitaine de la Milice à ce grade. Il faut rappeler que le précédent capitaine compte parmi les victimes. Pour elle, ces meurtres sont camouflés pour permettre au(x) vrai(s) coupable(s) d'agir dans l'ombre. Elle propose de mener une enquête parallèle, qui viserait le nouveau capitaine ainsi que le bourgmestre, qui l'a nommé sans sourciller. Les joueurs, en développant la conversation, pourront apprendre qu'elle est journaliste ou détective privé.

 

  Vous pouvez multiplier les pistes de cette façon, mais n'oubliez pas que trop de pistes noient les joueurs (sur une campagne, sur une enquête de longue haleine, ça peut être intéressant). L'important, c'est qu'il y ait du contenu, de la matière sur laquelle vos joueurs pourront travailler pleinement. Il faut leur donner de l'exploration, et un goût du risque, doublé d'un talent nécessaire pour la discussion. On a effectué la première partie du midgap, qui relève en fait d'un remplissage, d'une multiplicité de pistes. Vos joueurs choisiront peut-être la première, la bonne, et il ne tiendra qu'à vous de les bloquer, de leur donner de l'opposition, de la difficulté, ou du leurre, en les aiguillant d'abord sur les fausses pistes. Nous allons voir la seconde partie du midgap, dans un ordre d'accessibilité, qui sera, il y a des chances, celui choisi par les joueurs.

 

- Le patron développe sa théorie sur le Wawapacha des alpages, l'espèce de Wawapacha la plus dangereuse. Il fait rentrer les joueurs dans une cave enfumée d'encens et de substances étranges (façon That's 70's Show), et commence à sortir des grimoires étranges, écrits avec des écritures gothiques étranges, des images terrifiantes, et remplis de révélation sur la nature du monde. Sans trop y prendre gare, les joueurs, à coups de fumées douteuses et de lectures et de discours se font réveler le mythe de Cthulhu, et là vous avez le volant pour les amener droit à l'asile. La créature est connue pour agir dans le noir, quand les humains sont endormis, où rentrent chez eux. Elle plante deux griffes cylindriques dans le cou, pour toucher la colonne vertébrale et se nourrir du maintien, une énergie particulière, inconnue des hommes, et qui lui permet de se maintenir dans une jeunesse éternelle. Le vrai danger est qu'elle pratique le contrôle télépathique, et privilégie généralement les forces armées et les puissants. Elle sait également, par un sonar télépathique, quels sont les sujets de conversation à tout moment. Tiens, d'ailleurs, à ce moment, des coups puissants sont tapés contre la porte de l'auberge. Vous lancez l'action de la seconde partie du Midgap, qui devrait emmener les joueurs à la résolution de l'affaire...dans un temps de jeu relativement important. Où peut se trouver le Wawapacha ? S'il a avec lui la force de la ville, il compte parmi les notables, les autorités ou la Milice...à vous de trancher.

 

- Van Halen et Rossignol proposent aux joueurs de les accompagner, pour les former à la lutte contre les vampires, ces immondes créatures qui vivent dans le noir et se nourrissent de chair humaine. Van Halen est sur une piste chaude de sang et son excitation palpable pourra se heurter au rôle de la Milice, qui interdit à quiconque de passer la barrière du chemin qui mène au Château du mont Batmahuche. Première péripétie du midgap lancé. Ensuite, il s'agit d'aller au château, de se préparer et d'avoir d'éventuelles stratégies. Il s'avère, une fois arrivé sur place, que le château est accueillant et désert. Le noble occupant, D'Alucardino, est en train de peindre une femme blonde sur une toile jaunie, un ballon de vin rouge à côté de sa palette. Il invite les joueurs à prendre un repas (un dîner ? La nuit est déjà tombée, tiens...) en sa compagnie. Van Halen a un talon d'achille : l'alcool. Ne reste que Rossignol et les joueurs en piste. Après le repas, D'Alucardino annonce une soirée viennoise, et dévoile une salle de réception où quelques gens étranges s'arrêtent de danser pour regarder les nouveaux arrivants. Ils découvrent leurs fameuses dentitions, Rossignol répond en tirant avec fusil à pompe et des grenades fumigènes...le reste du midgap sera consacré à la fuite ou à la préparation de combats, selon si les joueurs se sont préparés à jouer une campagne à thème Vampires, ou s'ils ont fait la liste de crèmes solaires pour aller à la plage. Dans tous les cas, votre campagne est lancée, ou alors elle continuera. Les combats prennent du temps, parfois trop. Il faut gérer le temps entre les joueurs, surtout durant le midgap qui écrème les motivés des simples participants.

 

- Lady O'Quigley, la dame hautaine, journaliste et détective privé, commence avec les joueurs à enquêter sur les meurtres. Le MJ devra cumuler les indices, les liens entre les meurtres, et décider une méthode pour combattre le capitaine et le bourgmestre. Il s'agit alors pour les joueurs de noter des indices : un négociant, un bibliothécaire, un grossiste, un chômeur, un agriculteur, une bigote du temple...tous fréquentaient le temple, tous travaillaient au château, tous fréquentaient la famille du bourgmestre. L'ancien capitaine, dans ses papiers...ah pardon, il faut les trouver, ces papiers (voyez sa veuve, ou même des anciens amis de caserne?), ce qui prendra la première partie du midgap, facilement. L'ancien capitaine a vu le bourgmestre étendre son pouvoir en s'appuyant sur sa famille, présente partout. Il s'avère, en fouillant les papiers de recensement et en recoupant tous les métiers de la famille, que le nouveau capitaine est un cousin ayant un nom de famille différent du bourgmestre. Découvertes en fin de midgap : le négociant gênait des transactions entre la famille, le bibliothécaire avait fait des recherches sur le bourgmestre, le chômeur était un domestique ayant surpris une conversation entre le capitaine et le bourgmestre, l'agriculteur est un ancien ami de la famille, et la bigote a percé le secret en voyant toute la famille rassemblée au temple. Elle est d'ailleurs morte après confession. Le midgap découvre le secret : une ancienne famille royale est en train de reprendre le pouvoir à Castel Zumbat. Bienvenue dans un scénario adapté de Game of Thrones, vos joueurs forment une bande de mercenaires ou de soldats ou même de nobles en quête de leurs terres/richesses/gloires. Campagne lancée à la fin du midgap.

 

  Ces trois midgaps, possibles dans trois jeux de rôles, ont des points communs. Un but, des révélations, un ou des PNJ principaux à interpréter, à personnaliser, à définir. A faire évoluer, également. Pourquoi ne pas rendre Rossignol plus efficace que son maître ? Pourquoi Lady O'Quigley ne serait-elle pas une fille en rébellion contre sa famille ? Pourquoi l'aubergiste ne serait-il pas un grand scientifique blasé du monde ? Les PNJ forment une partie de l'histoire, soignez-les.

 

  Mais ils peuvent être facultatifs ! Penchez-vous alors sur l'histoire, montez les péripéties, accumulez-les et mettez vos joueurs en difficulté. Donnez-leur aussi des moments plus faciles, des satisfactions, car le midgap est souvent difficile. Cependant, il est stimulant, il permet de renaître, de ressortir grandi, et d'amener le final avec un enthousiasme renouvelé. Le plus important à retenir, c'est qu'un midgap n'est pas forcément linéaire. C'est une pelote à dérouler.

Finir en beauté ?

Lundi 21 avril 2014

  Bon, votre partie est en approche du terminus. Sauf que les choses sérieuses, à savoir le dénouement (sanglant, quel que soit le camp), les résolutions, les récompenses et la distribution d'expériences arrivent. Avant cela, il faut poser une question : est-ce qu'une partie doit toujours bien se terminer ? Je n'en suis pas sûr. Pour une série de petites parties, il n'est pas nécessaire de terminer difficilement. Mais pour une campagne, vous pouvez varier à loisir les fins, pour jouer avec les sentiments et les attentes de vos joueurs. Voyons les fins possibles pour les scénarios présentés dans les précédents articles :

 

- Après un passage par la case prison, les joueurs ont trouvé un moyen pour se protéger de l'espionnage télépathique sélectionné du monstre grâce à la chute d'un joueur dans un tas de fumier. Derrière ce scatologisme dépravé se cache une des plus grandes peurs du Wawapachas des alpages, qui est effrayé par l'odeur dégagée par les champs de vache, qui forment le meilleur rempart naturel contre lui. Vous avez l'info, mais le scénario est différent ? Adaptez-vous et faites une course poursuite dans une montagne, et un hasard salvateur qui devient une grande découverte. Vos joueurs n'en peuvent plus, la créature veut leurs morts à tout prix, et voilà qu'ils doivent éviter ou combattre des miliciens, de bons soldats voire de vrais guerriers, pour atteindre les deux boss finaux possibles : le capitaine de la Milice et le bourgmestre. Ils le protègent, ils sont contrôlés. L'un des deux peut être la créature, mais elle peut aussi être dissimulée parmi les notables. On peut imaginer un tout autre dénouement, par exemple un procès où la créature tente de les condamner à mort. On alors une collaboration, sait-on jamais...mais qui peut ramener sur une trahison. Les choix sont multiples, et il s'agit de laisser les joueurs décider de la marche à suivre pour terminer la partie. Vous pourrez ajouter votre patte, vos idées, pourquoi pas, mais le final ne vous appartiendra en fait que sur le papier. Enfin, il sera agréable de finir la partie chez l'aubergiste, qui va changer de vie, qui est peut-être mort ou trop blessé pour revenir pleinement joué...le plus important est d'arrêter une partie haletante dans un endroit tranquille, dans lequel les joueurs ont le sentiment d'être en sécurité, de pouvoir souffler et d'être à l'abri des crasses du MJ.

 

- Fin de partie pour les vampires, Rossignol et vos joueurs. Après avoir échappé à la mort, ils ont fui ou sont restés pour finir le travail. Van Halen est mort ou oublié ou sauvé in extremis. Là, tout dépendra du moral de vos joueurs : partir ou continuer ? Lancer la campagne ou arrêter le massacre ? Considérer que c'était un one shot sympa et tester autre chose ? Il y a des fins de scénario qui signent des arrêts de parties...j'en sais quelque chose, je vous raconterai un jour. Les joueurs veulent déboîter du dentu ! Okay, dernière motivation, dynamisez leurs préparatifs, conseillez-les, et dans le même temps pensez déjà aux ennemis qu'ils vont affronter. Pensez aux attaques, aux mouvements, aux pièges, et soyez toujours honnête dans les combats avec vos joueurs ! La phase de combat peut s'éterniser, penser peut-être à des portes de sortie rapides. Lancez les combats, et la partie se finira là-dessus, quand tous les vampires auront été massacrés, et que les joueurs seront rentrés au village fiers comme des papes. Pour que tout le monde suive le combat, le MJ doit gérer les temps de parole, distribuer assez équitablement les combats pour que les joueurs ne lâchent pas le fil de la partie. Les combats finaux, s'ils sont compliqués, longs, laborieux, sont toujours les plus difficiles à suivre...ils demandent une concentration qui s'est peut-être déjà envolée. C'est à vous, MJ, de donner l'impulsion et le dynamisne des combats, pour que les joueurs aient envie de suivre tout ce qui se passe. C'est difficile, mais parfois nécessaire.

 

- Comment réussir à contrer les plans d'une famille qui tente de prendre le contrôle d'une ville ? Les joueurs vont mordre sur la fin du midgap pour répondre à cette question. Il y a une multitude de fins possibles, qui mènent à des suites ou à des arrêts définitifs. Alerter la population, chercher des ennemis de cette famille, l'affronter en solo, l'assassiner membre par membre, les harceler...le MJ préservera son droit de représailles, qui suivra l'action des joueurs. Si vous avez bien lu les deux précédents paragraphes, vous aurez remarqué que plus le scénario avance, moins le MJ a de contrôle sur la partie. Au début, il lance, il gère tout. En midgap, il gère mais lance des portes libres, voire nouvelles, pour que les joueurs suivent leur propre chemin ou s'en crée un. La fin, assez souvent, relève de l'improvisation. Du moins en grande partie. Pour plusieurs raisons qu'on retrouve nettement dans cet exemple : la fatigue rend le MJ moins attentif, peut-être plus disposé à improviser. Les joueurs guident la partie, et le final indique un choix à faire, une action précise à mener dans un sens, ce qui ferme les autres pistes d'action. Les joueurs pourront faire également des choix qui sauveront le groupe, qui le rendront encore plus réputés ou efficaces, ou des choix qui les mèneront à la mort d'un ou des personnages. Le final, c'est le moment le plus risqué, dans une partie montant en crescendo, car le MJ ne fait plus qu'appliquer les conséquences directes des actions des joueurs qui possèdent désormais toutes les cartes en main. Le scénario est quasi bouclé, livré, terminé, et c'est aux joueurs de conclure l'affaire. Dans cet exemple, on ne peut même pas donner une résolution possible. Vous prendrez celle que vous voudrez, et ce sera votre partie.

 

 

D'ailleurs, laquelle de ces trois parties prendriez-vous ?

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